vendredi 28 décembre 2007

Union méditerranéenne. Quelques réactions

Ce qui est remarquable dans le projet français , selon certains experts, est le haut degré de coopération par rapport au processus de Barcelone initié en 1995. On passe d'une coopération à une Union, en d'autres termes, le projet français établit un dialogue d'égal à égal avec ses partenaires du sud, ce qui n'était pas le cas, ni avec le processus de Barcelone, ni avec la politique européenne de voisinage (PEV).

La visite du président français dans les pays du Maghreb qui a été suivi par une autre visite des principaux états africains s'inscrit dans une démarche visant à promouvoir le projet de l'Union Méditerranéenne développé dans le discours présidentiel du 16 Mai 2007.

Cette initiative française a été entreprise pour mesurer la réaction des pays concernés en profitant de la présence de onze pays, principalement la Turquie et le Portugal. La Turquie, pour sa réticence à l'idée d'un projet qui le considère comme une manœuvre française de blocage des négociations de son adhésion à l'Union Européenne, et le Portugal, comme principal pays favorable à une telle initiative, et président en exercice de l'Union Européenne. En effet, certains pays européens ont émis des réserves sur le projet français, ils le considèrent comme une initiative française visant à concurrencer la politique européenne de voisinage (PEV) .
Ce qui est remarquable dans le projet français est le haut degré de coopération par rapport au processus de Barcelone initié en 1995. On passe d'une coopération à une Union, en d'autres termes, le projet français établit un dialogue d'égal à égal avec ses partenaires du sud, ce qui n'était pas le cas, ni avec le processus de Barcelone, ni avec la politique européenne de voisinage (PEV).
C'est ce point précis qui a intéressé les politiques et intellectuels de la rive sud de la Méditerranée et qui a donné une certaine légitimité au projet français : selon le chercheur tunisien Ahmad Wanis (Entretien accordé au journal londonien Al Hayat le 7 juillet 2007) le projet français pourrait approfondir la coopération euro-méditerranéenne et ajuster les erreurs commises dans le processus de Barcelone. Le chercheur Wanis, qui a été ambassadeur de la Tunisie en Russie et en Espagne, a expliqué que cet élan d'optimisme est dû à l'idée que le projet développe un système identique à celui de l'Union Européenne malgré un contexte géographique et économique différent, c'est-à-dire on passe du stade de la coopération à un stade plus élevé qui est l'union. Cet avis est partagé par l'ancien Premier Ministre algérien Ismail Hamdani qui a émis quelques observations, notamment : une définition commune du terrorisme et sa différenciation de l'islam, le développement durable et la lutte contre l'immigration clandestine en s'appuyant sur un système de sécurité collective.

M. Antonia Dias Farina, Secrétaire Général de l'académie des sciences politiques de Lisbonne ( Entretien accordé au journal londonien Al Hayat le 7 juillet 2007), a quant à lui considéré que le projet français serait la réponse idéale aux crises géopolitiques et économiques que traversent la région et un moyen pour favoriser le dialogue des cultures entre les deux rives de la Méditerranée.

D'un autre côté, l'Union Méditerranéenne pourrait avoir les mêmes blocages du processus de Barcelone ce qui pose la question des garanties à développer pour éviter un tel échec. Le chercheur Wanis argumente que l'idée de l'union peut éviter un tel blocage, car elle construit une relation bilatérale à un niveau supérieur du niveau de la coopération.

Quoiqu'il en soit, sans une réelle volonté européenne d'engagement, on ne peut pas espérer un développement réussi d'un tel projet, de plus il y a une responsabilité des pays de la rive sud, qui n'ont pas déployé des efforts de réforme comme c'était le cas de l'Europe de l'Est qui a réussi son intégration à l'espace européen grâce à une réforme structurelle de son économie et de son système politique.

Le projet français est bâti sur une base solide qui prend en compte les échecs du processus de Barcelone. En effet, le projet de l'Union Méditerranéenne est issu d'un rapport d'expert connu sous le nom du «Rapport Avicenne » qui a critiqué l'Union Européenne dans son application de la politique européenne de voisinage : le rapport reproche à la commission de privilégier une intégration rapide de l'Europe de l'Est en diminuant le degré de coopération avec les pays de la rive sud de la Méditerranée. (Rapport Avicenne, Maghreb-Moyen Orient : Contribution pour une politique volontariste de la France, Avril 2007).

Parmi les préconisations du rapport, on trouve la nécessité du dialogue avec les islamistes modérés sans pour autant dialoguer avec les intégristes en privilégiant un contact direct avec les associations civiles plutôt qu'avec les institutions étatiques. Ces préconisations s'inscrivent dans une stratégie d'influence française qui se développe sur un axe allant du bord du Bosphore en Turquie jusqu'aux côtes atlantiques en Mauritanie.

On peut se poser la question de la fiabilité d'un tel ambitieux projet. Les récentes visites du président en Afrique du Nord et la résolution très médiatique de l'affaire des infirmières bulgares montre bien une certaine réussite du président français. Reste à savoir si Paris arrivera à imposer sa vision de la coopération Nord-Sud tout en retrouvant son influence dans une région stratégique pour la France et pour l'Europe.

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